| N'EST-CE PAS, loc. inv. [Présente les obligations découlant de l'acte de parole qui est (vient d'être) accompli (par le locuteur ou l'interlocuteur) comme ayant déjà été acceptées par le destinataire de cet acte] A. − [L'acte de parole est une assertion] 1. [L'assertion est accomplie par le locuteur] Rem. Dans cet emploi n'est-ce pas entraîne généralement une demande de confirmation. a) [N'est-ce pas suit l'assertion]
α) [L'assertion est de forme déclarative] −Manerve est votre ami, n'est-ce pas? −Oui. Vous le savez (Ponson du Terr.,Rocambole,t.3, 1859, p.387).Raconte-moi le reste: elle t'a fait entrer chez elle, n'est-ce pas?... Elle veut se remarier? (Erckm.-Chatr.,Ami Fritz,1864, p.6).−Vous avez appris comment il avait été blessé? −Vaguement... En permission, n'est-ce pas (Martin du G.,Thib.,Épil., 1940, p.896). − [Le destinataire (auquel est demandé son accord) est spécifié] Vous m'en voulez, n'est-ce pas, Constant? (Bernstein,Secret,1913,iii, 2, p.33).Quelle folie de choisir une place pareille pour dormir! De l'autre côté de la pelouse, nous t'entendions. N'est-ce pas, Miss? (Bernanos,M. Ouine,1943, p.1350): 1. −Je ne peux pas laisser Sibylle seule à l'hôtel... −Mais elle viendra, Sibylle!... Pour une fois, elle se couchera à minuit... Ça lui sera bien égal... n'est-ce pas, petite?...
Gyp,Souv. pte fille,1928, p.49.
β) [L'assertion est de forme exclam.] Ah! père Didace! Quel bon vent pour la chasse, n'est-ce pas? (Guèvremont,Survenant,1945, p.276). b) [N'est-ce pas précède l'assertion; l'assertion est de forme déclarative] − [L'assertion n'est pas une complétive] En général, je tremble de vous déplaire... Je vous aime. Alors, n'est-ce pas, on a peur (Bernstein,Secret,1913,ii, 11, p.27).Alors, n'est-ce pas? Suivant que je veux mon malade plus ou moins étendu, je fais fonctionner cette manivelle, là (Feydeau,Dame Maxim's,1914, i, 19, p.22).Dona Prouhèze: Est-ce que vous êtes dégagé de tout cela? Don Camille: N'est-ce pas, vous aimeriez que je vous rassure? (Claudel,Soulier,1944, 1repart., 1rejournée, 3, p.951). ♦ [Le destinataire (auquel est demandé son accord) est spécifié] Vous n'avez pas l'air fort, avec ça... N'est-ce pas, Lorilleux, Madame n'a pas l'air fort? (Zola,Assommoir,1877, p.429). − [L'assertion est une complétive introd. par que] N'est-ce pas qu'Aguida est belle, −fit-il, pleurant toujours (Benoit,Atlant.,p.201).Je parlais à Anne. −N'est-ce pas que c'est utile, le baccalauréat? (Sagan,Bonjour tristesse,1954, p.98). ♦ [Le destinataire (auquel est demandé son accord) est spécifié] Tu peux leur donner ta part et celle des autres, ils s'empliront jusqu'à crever... N'est-ce pas, Alzire, que nous avons tous mangé du fromage? (Zola,Germinal,1885, p.1229).Je suis sûre que vous devez bien tirer, vous Ferdinand? Si c'était la fête encore, je ferais un match avec vous!... N'est-ce pas que vous tirez bien Ferdinand? (Céline,Voyage,1932, p.74). c) [N'est-ce pas se trouve en position d'incise]
α) [N'est-ce pas occupe une coupe syntaxique dans la prop.] Tandis qu'avec l'institutrice, ils sont, n'est-ce pas, chicaniers et avares (Alain-Fournier,Meaulnes,1913, p.231).−Il faisait sombre, n'est-ce pas, dans la chambre où il était. −Très sombre (Benoit,Atlant.,1919, p.275).Ça va, dit-il froidement. C'est Trochut, n'est-ce pas, que tu t'appelles? Tes prénoms, maintenant... Allez! vite! (Genevoix,Raboliot,1925, p.44). − [Le destinataire est spécifié] Cependant, il faut espérer, il faut espérer, n'est-ce pas, Sainclair? qu'il s'est trompé! (G.Leroux, Parfum,1908, p.14).Si le jeune homme, mon frère, vient chercher ceci, vous lui direz, n'est-ce pas, Gaston? de laisser son adresse (Aragon,Beaux quart.,1936, p.376).
β) [N'est-ce pas se trouve entre le thème en position détachée et la proposition elle-même] Le service n'est-ce pas, ce n'est pas grand'chose? (...) Je suis 1erau classement final des dispensés (Rivière,Corresp.[avec Alain-Fournier], 1907, p.120).Et je savais qu'il préférait ne pas retourner chez ses parents... Les parents, n'est-ce pas, une fois qu'on les a quittés... (Gide,Faux-monn.,1925, p.1193).Cristina: (...) L'amour avec lui, c'est une chose... que je peux pas vous expliquer! Antoine: Bien sûr, Madame. Ces choses-là, n'est-ce pas, ça ne se discute pas! (Bourdet,Sexe faible,1931, iii, p.408): 2. ... j'en vois plus clair sur les cinq heures... C'est à ça que je vois que j'en ai de la fièvre parce que pour la chaleur, n'est-ce pas, c'est difficile d'avoir plus chaud qu'on a ici...
Céline,Voyage,1932, p.207. 2. [L'assertion est accomplie par l'interlocuteur] Lapin, dit-elle, en souriant, lapin lapinovitch... −Il te ressemble, dit Kyo. −N'est-ce pas? (Malraux,Cond. hum.,1933, p.212).−Ces premières heures de campagne vous étourdissent... −N'est-ce pas! s'écriait MmeRosenthal avec un accent triomphal (Nizan,Conspir.,1938, p.135). − [L'assertion est de forme interrogative et négative; le destinataire est spécifié] Créon: Pourquoi n'est-ce pas le première classe qui est venu? Le Garde: N'est-ce pas, chef? Je l'ai dit tout de suite, moi. C'est le première classe qui doit y aller (Anouilh,Antig.,1946, p.161). B. − [L'acte de parole est une requête; en disant n'est-ce pas, le locuteur demande à l'interlocuteur de confirmer son accord pour faire ce que requiert l'acte de parole] 1. [L'acte de parole est une requête exprimée par une phrase déclarative] a) [N'est-ce pas suit la phrase] Vous m'accompagnerez, n'est-ce pas... si cela ne vous ennuie pas trop? (Dumas fils, Dame Cam.,1848, p.51).Mon cher abbé, vous permettez que je lise, n'est-ce pas? (Villiers de L'I.-A.,Contes cruels,1883, p.301): 3. Julie, dit-il, je ne te permets point de parler ainsi de ta maîtresse. Tu entends, n'est-ce pas? Ne l'oublie plus à l'avenir.
Maupass.,Contes et nouv.,t.2, M. Parent, 1886, p.590. b) [N'est-ce pas précède la phrase] Je ne puis pas rester, je veux m'en aller tout de suite... n'est-ce pas? Docteur, vous m'aiderez, vous me donnerez bien les moyens de m'échapper et de rentrer à Paris (Zola,Débâcle,1892, p.485). 2. [L'acte de parole est une requête exprimée par une forme impér.] Ne parlons plus de cet effet-là, n'est-ce pas? (Sardou,Rabagas,1872, iv, 6, p.180). Rem. 1. Les emplois où n'est-ce pas est une loc. ne doivent pas être confondus avec ceux où il s'agit du verbe être employé dans la tournure interro-négative correspondant à c'est. Dans ce cas, ce qui suit n'est-ce pas recouvre tous les types d'attributs possibles du verbe être employé dans la tournure interro-négative correspondant à c'est. Dans ce cas, ce qui suit n'est-ce pas recouvre tous les types d'attributs possibles du verbe être a) Syntagme nom. N'est-ce pas le marquis de Cibo qui passe là? (Musset, Lorenzaccio, 1834, v, 3, p.259). N'est-ce pas une chose risible de vous demander (...) l'assouvissement du corps et celui de l'âme? (Claudel, Soulier, 1944, 1repart., 2ejournée, 9, p.1034). b) Syntagme verbal. Regardez! Ils lui ont donné ça, n'est-ce pas se foutre du monde? (Zola, Germinal, 1885, p.1291). c) Syntagme adj. N'est-ce pas effrayant à penser que la fortune de David Séchard dépende d'une jolie paire de bottes (Balzac, Illus. perdues, 1843, p.672). d) Syntagme prép. N'est-ce pas au nom de la paix et de la liberté même que Louis, Lafayette, et tous ses complices (...) troubloient l'État, calomnioient et assassinoient le patriotisme (Robesp., Discours, Guerre, t.8, 1792, p.192). e) Syntagme adv. Oh! n'est-ce pas assez de la pâle vieillesse, De tous les rongements de la vie en faiblesse (Barbier, Iambes, 1840, p.73). 2. S'pas? et pas? sont des var. pop. de n'est-ce pas. Prononc.: [nεspɑ], [-pa]. Étymol. et Hist. 1722 n'est-ce pas que (A. Piron, Arlequin-Deucalion, p.358); 1723 n'est-ce pas (Marivaux, Surprise de l'amour, III, 4). Comp. de la négation ne*, de est 3epers. de l'ind. prés. de être*, du pron. dém. ce* et de l'auxil. de négation pas*. Bbg. Borillo (A.). La Négation et l'orientation de la demande de confirmation. Lang. fr. 1979, no44, pp.27-41. |